Alors qu’Amazon traque les salariés solidaires du mouvement des Gilets jaunes, une répression féroce s'est abattue contre un groupe de Gilets jaunes qui a mené une action pour dénoncer le gaspillage perpétré par Amazon.
Amazon ou « l’infamie sociale et environnementale »
A Lux, en Saône-et-Loire, les gilets jaunes sont mobilisés depuis le début sur des thématiques sociales, dans cette région frappée par la pauvreté et la précarisation des services publiques. Après avoir soutenu le personnel du bloc opératoire de William-Morey, à Chalon-sur-Saône, les sapeurs pompiers et un Ephad afin de « prendre soin des maillons faibles du tissu social que l’État délaisse complètement », comme le raconte David, un employé de station-service, les Gilets jaunes regroupés autour du QG du rond-point de Lux, ont décidé de s’en prendre à Amazon, géant dont l’entrepôt se situe deux kilomètres plus loin à Sevrey.
Le 13 janvier dernier dans l’émission Capital diffusée sur M6, les Gilets jaunes de Lux ont pu constater le gaspillage monumental dont est responsable la première entreprise au monde. En effet, en 9 mois, le site de Sevrey a jeté 293 000 produits invendus. Comme le souligne Daniel, un gilet jaune, « ce n’est même plus de l’obsolescence programmée, c’est carrément des produits gaspillés avant même d’avoir pu servir à quelqu’un ». Alors que le mouvement des gilets jaunes s’était lancé sur le thème de l’injustice fiscale et contre l’hypocrisie de vouloir faire payer la crise écologique à ceux qui polluent le moins, l’impunité d’Amazon tant sur le plan de l’évasion fiscale que sur le plan du gaspillage des ressources a ligué les Gilets jaunes de Lux contre lui.
L’entreprise qui embauche près de 500 personnes dans la région et qui de fait est un acteur économique majeur en Saône-et-Loire, est aussi connue pour être « une infamie sur le plan social et environnemental ! » selon Daniel. Il dénonce notamment les « pratiques de management à l’américaine », les « concours chronométrés » et la « pression dingue qu’ils mettent sur les salariés » qui est la règle chez Amazon. Les conditions de travail déplorable, l’impunité fiscale et écologique, voilà qui a révolté les gilets jaunes du rond-point de Lux et les a poussé à mener une action contre le géant de la vente en ligne.
Amazon contre les Gilets jaunes et leurs soutiens
Le 4 janvier dernier, une soixantaine de gilets jaune s’est ainsi dirigée vers l’entrepôt d’Amazon à Sevrey. L’action visait à filtrer l’entrée du site afin de ralentir l’activité de l’entreprise. Cette initiative n’a pas plu à la gendarmerie qui s’est déplacée en masse et a abattu une répression féroce contre les manifestants. Les charges et les tirs de lacrymogène des gendarmes ont forcé les gilets jaunes à se replier vers leur QG à Lux. Sur le chemin du retour, 18 personnes ont été interpellées avec une très grande violence dont une mineure de 15 ans.
Daniel raconte avoir été attaqué dans le dos par un gendarme alors même qu’il n’avait pas participé à l’opération de filtrage, il a été blessé au genou et a eu une côte cassée. La personne mineure arrêtée lors de l’opération a elle aussi été blessée. Les gilets jaunes ont ensuite été répartis dans toutes les gendarmeries du département et ont vu leur droit à avoir un avocat systématiquement bafoué. 13 d’entre eux ont été poursuivis avec des peines d’une grande sévérité. Devant la violence de ces interpellation, les Gilets jaunes de Lux parlent de rafles, ce qui n’est pas sans rappeler celle de Mantes-la-jolie, survenue le 6 décembre 2018.
Par ailleurs, cette répression s’inscrit dans le contexte d’une véritable traque, effectuée par Amazon envers les salariés qui pourraient se montrer solidaires du mouvement des Gilets Jaunes - une façon d’éviter la risque de la contagion avec le monde du travail. Il y a quelques jours on a en ainsi appris que deux travailleurs de la plate-forme de Lauwin-Planque, dans le Nord, avaient été licenciés pour faute grave, sans préavis ni indemnité. Ceux-ci s’étaient rendus coupables d’avoir appelé à bloquer leur site. Une répression d’autant plus inquiétante que l’appel avait été lancé sur leur profil Facebook personnel, auquel Amazon n’était pas censé avoir accès.
Rebelote le lundi 14 janvier, on apprenait cette fois que cinq salariés ont été convoqués sur le site de Montélimar, accusés d’avoir soutenu le mouvement des Gilets jaunes sur les réseaux sociaux. Si l’on ne connaît pas encore les faits précis ni les sanctions encourues, c’est donc une véritable cabale qui est actuellement menée par Amazon, qui cherche à faire des exemples et à intimider pour éviter que cela donne des idées à d’autres salariés.
Cet épisode illustre par ailleurs parfaitement le rôle de milice du capital de la police et de la gendarmerie. Quand on s’attaque à l’économie, l’État est toujours là pour porter assistance à ceux qui possèdent les entreprises et la richesse et pour réprimer ceux qui s’attaquent aux capitalistes. Dans leur droit de réponse au préfet, les gilets jaunes de Lux dénoncent tout l’arsenal répressif de l’État (d’urgence) bourgeois qui a mené là « une opération de police politique disproportionnée », des « arrestations au hasard du seul fait de détenir un gilet jaune », des « violences injustifiées », des « gardes à vue injustifiables » avec une « sévérité des poursuites judiciaires engagées » qui impliquait un « fichage des opposants politiques, et les violations de nos droits, y compris la violation du droit à être assisté d’un avocat ».
Crédit photo : Nicolas Desroches.
Publié par REVOLUTION PERMANENTE