Pendant qu'hôpitaux, lignes de train, écoles et services publics ferment, les capitalistes sont à la fête.
Ce lundi 27 mai, le groupe automobile Fiat Chrysler Automobile (FCA) a officiellement envoyé un projet de fusion avec l’entreprise Renault. Cette fusion, si elle est acceptée par le groupe Renault, donnerait naissance au troisième groupe mondial de constructeur automobile. La proposition de FCA consiste en la réunion des deux entreprises par le biais d’une holding, une société regroupant à 50-50 les actionnaires du groupe Renault et ceux de l’entreprise italo-américaine, coté à Paris, Milan et New York et dont la maison mère serait de droit hollandais. Pour le moment, la fusion n’est pas encore effective puisque le conseil d’administration de Renault doit étudier l’offre et donnera une réponse d’ici quelques jours, voire quelques semaines. D’ores et déjà, selon le Financial Times : « le conseil d’administration de Renault, qui s’est réuni lundi matin, a déclaré qu’il "étudierait avec intérêt l’opportunité d’un tel regroupement d’entreprises", le qualifiant de "proposition amicale". Il vise à prendre une décision initiale le plus tôt possible, potentiellement d’ici la semaine prochaine, selon les personnes informées à ce sujet. »
En tout état de cause, la « proposition amicale » » se promet d’être lucrative. Quelques milliards de plus pour gonfler les poches, déjà bien remplies, des actionnaires selon les chiffres du Financial Times : « En raison des différences de valeur de marché au début de la journée, les actionnaires de FCA recevraient un dividende de 2,5 milliards d’euros avant la clôture de l’opération. La valeur de la transaction fluctuera en fonction du cours des actions. »
Selon le rapport de FCA, cette holding donnerait naissance à un troisième « fabriquant d’équipement d’origine » (FEO) dont les ventes annuelles devraient atteindre les 8,7 millions de véhicules avec une « forte présence dans les régions et segments-clés » permettant d’engranger pas moins de 170 milliards d’euros de chiffre d’affaires. Cette fusion sera donc une nouvelle opportunité pour les grands monopoles de faire des profits extravagants sur le dos des travailleurs.
La holding en projet devrait devenir un « leader mondial dans un secteur automobile en rapide évolution avec un fort positionnement dans les nouvelles technologies, dont les véhicules électriques et autonomes », car si FCA s’intéresse à Renault, ce n’est pas sans arrière-pensées. FCA a effectivement besoin des apports techniques que pourrait lui offrir Renault, en particulier en matière de véhicules électriques, FCA n’offrant pour le moment aucun véhicule de cette sorte dans sa gamme. Les intérêts sont donc bien présents pour FCA, mais également pour Renault puisque cette fusion permettrait l’ouverture des marchés d’Amérique du Nord grâce aux gros véhicules SUV ou pick-up à prix rentable.
Seulement, les intérêts de cette fusion pour les deux entreprises ne sont pas uniquement directs. FCA et Renault doivent joindre leur force pour réaliser les investissements colossaux nécessaires à l’évolution technologique dans l’automobile, notamment l’électrification, la conduite autonome ou les véhicules connectés, qui sont déjà estimés à plus de 250 milliards d’euros pour les sept prochaines années. Mais les actionnaires des deux entreprises ne perdent pas de vue leur principal objectif : le profit. Les synergies annuelles sont dès à présent évaluées à plus de cinq milliards d’euros, ajoutées à celles déjà existantes de l’alliance de Renault avec les groupes japonais Nissan et Mitsubishi Motors.
L’autre actionnaire central de la potentielle nouvelle holding est évidemment l’Etat français qui détient actuellement 15% des parts de Renault. La porte-parole du gouvernement, Sibeth Ndiaye, a réagi dès lundi matin à propos de cette fusion en assurant que « le gouvernement y est favorable », ce qui était évidemment prévisible lorsque l’on voit les bénéfices hors-normes que cette fusion pourrait apporter.
Une fusion qui permettrait d’étendre la puissance de l’impérialisme français face à ses concurrents internationaux. C’est pourquoi, elle continue : « c’est important pour nous parce que ça témoigne de notre capacité à répondre aux enjeux de souveraineté économique européenne et française dans un contexte de mondialisation où on a de très grandes entreprises, des géants qui se sont construits en dehors de l’Europe, et aujourd’hui, on a besoin que des géants se construisent en Europe ».
Or, ce qui semble être bénéfique pour le gouvernement ne l’est pas pour autant aux yeux des travailleurs de l’automobile qui, à cause de cette fusion, vont être sur la sellette. La porte-parole tente tout de même de rassurer un maximum en exigeant timidement qu’il « faut que les conditions dans lesquelles se réalise cette fusion soit à la fois favorable au développement économique de Renault et évidemment aux salariés de Renault ». Quelle hypocrisie lorsque l’on connait le sort qui est réservé aux travailleurs. En plein procès France Télécom, les « restructurations » et autres fusions provoquent de véritables massacres sociaux : licenciements, troubles psycho-sociaux, suicides.
Il est en effet typique lors des fusions d’entreprises que de nombreux ouvriers se retrouvent mis à la porte, et c’est évidemment le risque ici une fois de plus. Lorsque l’on voit l’avidité de la famille Agnelli qui sera aux commandes de cette holding, on ne peut que redouter de graves conséquences pour les intérêts des travailleurs.
Crédit photo : AFP/Marco Bertorello et Loïc Venance
Publié par REVOLUTION PERMANENTE