Cette année encore McDonald’s engrange les bénéfices. A l’assemblée générale mondiale des actionnaires, qui se tient le 23 mai 2019, la multinationale affiche un bénéfice record de 5,9 milliards de dollars. Excusez du peu ! Les quelque 1500 restaurants français de la chaîne de fast-food contribuent largement à ce résultat, puisque l’hexagone est le deuxième marché de McDo après les Etats-Unis. Pourtant, si l’argent coule à flots pour les actionnaires, la multinationale ne paie quasiment aucun impôt en France, en Europe et même dans le monde. Quant à leurs salariés, ils sont majoritairement cantonnés au salaire minimum et à des temps partiels.
En décembre 2015, la Commission européenne a ouvert une enquête sur McDonald’s. Les investigations menées par la commissaire européenne à la concurrence Margrethe Vestager ont conclu qu’il y avait une « absence d’imposition de certains bénéfices de McDonald’s au Luxembourg ». L’enquête a aussi montré que McDonald’s bénéficiait même d’une « double non-imposition » : la multinationale ne paie d’impôt ni au Luxembourg, ni aux Etats-Unis (dans l’Etat du Delaware) où elle évade pourtant in fine ses bénéfices.
Comme l’a expliqué Margrethe Vestager : « Notre enquête approfondie a […] démontré que la double non-imposition résultait en l’espèce d’une incompatibilité entre les législations fiscales luxembourgeoise et américaine, et non d’un traitement particulier accordé par le Luxembourg ». Pour le dire autrement, ce qui intéressait la Commission européenne c’était de savoir si McDonald’s avait bénéficié d’une aide illégale d’Etat de la part du Luxembourg, ce qui aurait été une distorsion du droit de la concurrence et aurait été condamnable par le droit européen. Comme il ne s’agit ici pas de « concurrence » mais d’évasion fiscale, McDonald’s peut continuer ses petits arrangements qui rapportent des milliards. Aucune directive, aucun Traité ne vient lui interdire d’évader ses bénéfices ni l’obliger à payer ses impôts dans les pays où ils sont réalisés.
Si McDonald’s est une multinationale championne de l’évasion fiscale, elle est aussi celle des bas salaires. A Paris, à Marseille, à Bezons ou encore à Rouen, les « équipier•es » nous ont raconté la même galère. Travailler à McDonald’s c’est travailler pour de très petits salaires. Payés au SMIC, à temps partiel, avec des horaires atypiques qui obligent à faire parfois de longues pauses entre deux shifts (services), les salarié•es gagnent en moyenne moins de 1000 euros chaque mois.
Lors de la commission d’enquête citoyenne, les consommateur•trices de la chaîne de fast-food ont fait part de leur solidarité avec les salarié•es de McDonald’s. La centaine de client•es interrogé•es plaident pour une revalorisation des salaires. Comme ils l’expliquent : « le SMIC ne suffit pas pour vivre », puisqu’ils « ont des conditions de travail difficiles dans la restauration rapide », que leur travail est « speed », « usant », les amène « à travailler les week-end et en soirée… » et que c’est « difficile d’avoir une vie de famille et de voir les amis » dans ces conditions.
La multinationale a aussi mis en place système de franchise et d’évasion fiscale néfaste aux salarié•es, et ce pour plusieurs raisons. Aujourd’hui, en France, près de 90% des restaurants McDonald’s sont « franchisés ». Ils n’appartiennent pas directement à McDonald’s mais à de « petit•es propriétaires » qui détiennent des restaurants de la marque. L’avantage pour McDonald’s est que chaque restaurant franchisé est considéré comme indépendant des autres restaurants et du groupe. Dans la plupart des cas, cette situation permet à McDonald’s d’éviter la mise en place d’un Comité d’entreprise dans le restaurant. Cette situation prive les salarié•es de la prime de participation : chaque année c’est plus de 40 millions d’euros de participation qui échappent aux équipier•es, et ce alors que « en même temps », la multinationale profite d’aides publiques, notamment du CICE pérennisé par Emmanuel Macron (soit 49 millions en 2015).
Le système de franchise actuel est clairement un moyen pour la direction de McDonald’s de diviser les salarié•es pour mieux régner. En effet, ce système complique la désignation de délégué•es syndicaux•ales et la mise en place de comités d’entreprise. De nos entretiens avec les représentants des organisations syndicales de McDo, il apparaît que la multinationale est déterminée à empêcher toute expression syndicale. Les salarié•es ont dénoncé l’importante répression syndicale qui s’abat sur eux•elles. En effet, l’entreprise n’hésite pas à les pousser à la « faute » et à licencier les syndicalistes qui réclament des conditions de travail décentes.
Comme le montre le rapport de l’association Zero Waste publié en 2017, le principe du tout-jetable sur lequel est fondé le modèle d’entreprise de McDonald’s est responsable de la production d’une quantité considérable de déchets : chaque minute, l’entreprise utilise près de 2,8 tonnes d’emballages jetables pour servir ses client•es à travers le monde, ce qui représente 115 tonnes d’emballages jetés par jour en France (soit plus d’1 kg par seconde). McDo produit une montagne de déchet et recycle encore très peu… Le tri n’est toujours pas généralisé à l’ensemble des restaurants en France.
Pour que McDo et toutes les multinationales, qui pratiquent les mêmes abus, rendent l’argent, j’ai rédigé une « Directive McDo ». Je la porterai une fois élue au Parlement européen pour mettre fin à l’impunité fiscale des multinationales et récupérer les 900 milliards d’euros qui s’évadent chaque année de l’Union européenne.
Leïla Chaibi, candidate aux élections européennes en troisième position sur la liste de la France insoumise menée par Manon Aubry.
Publié par Anti-K