Face à la persévérance du mouvement de contestation massif, la cheffe du gouvernement local, Carrie Lam, a déclaré ce mardi que le projet de loi sur les extraditions « est mort ».
Les manifestations actuelles à Hong Kong sont les plus importantes qui ont traversé l’histoire de l’ex-colonie britannique, dépassant largement celles de 2014. En cause, un projet de loi impulsé par l’exécutif local et appuyé par Xi Jinping permettant l’extradition immédiat des nombreux dissidents chinois vers le continent qui actuellement se réfugient dans l’île.
Celle-ci en suivant le modèle « un pays, deux systèmes », jouit d’un statut politique, économique et social particulier, – à l’occidentale – qui confère à ses citoyens des droits plus importants, incluant par exemple le libre accès à Internet ou la liberté de réunion. Ce fait avait poussé à des nombreux militants du mouvement étudiant et ouvrier chinois à se réfugier dans l’île et à établir la base de ses organisations dans un moment où le gouvernement de Pékin avait intensifié la persécution des activistes dans le pays.
La contestation massive que ce projet de loi à déclenché avec plus d’un quart de la population de l’île mobilisé, dure depuis un mois et s’est transformé dans un lutte qui va au-delà du projet de loi en visant aussi la démission de la cheffe du gouvernement local, Carrie Lam, et plus largement le gouvernement central de la chine continentale qui peu à peu absorbe cette région semi-autonome. Face à l’énorme opposition de la population, mais aussi des hommes d’affaires locaux profitant de ce régime plus souple, ainsi qu’aux critiques internationales croissantes, notamment les menaces des Etats-Unis, Pékin avait demandé fin juin à Carrie Lam d’abandonner temporairement le projet.
Cette manœuvre du gouvernement local visant à calmer la contestation a cependant, rapidement échoué. Les mobilisations massives se sont poursuivies et radicalisé – avec l’envahissement et l’occupation du parlement local – en rappelant mais aussi en élargissant ses revendications : l’abandon définitif du projet de loi, le suffrage universel, la démission de Carrie Lam et l’amnistie des protestataires poursuivis en justice depuis des heurts avec la police le 12 juin dernier.
Dans ce climat, après d’une semaine d’absence, poussé par la rue, les milieux d’affaires hong-kongais et le gouvernement de Pekin, la cheffe de l’exécutif s’est vu obligée à convoquer une conférence de presse ce mardi 9 juillet pour annoncer la fin du projet de loi sur l’extradition : « alors, je le redis, il n’y a aucun projet de la sorte, la loi est morte ».
Cependant les étudiants, en première ligne des mobilisations, ont rejeté ces déclarations en les prenant comme une nouvelle manœuvre du gouvernement. Chan Wai Lam William, du syndicat étudiant de l’Université chinoise de Hong Kong, a ainsi expliqué : « ce que nous voulons, c’est le retrait définitif du projet. Elle joue avec les mots ». De même Fernando Cheung, un avocat interviewé par Reuters, a jugé insuffisante l’annonce de Carrie Lam « si elle n’établit pas une commission d’enquête indépendante, [sur les violences policières] c’est la mort de son administration, pas seulement du projet de loi. Cette crise ne peut pas se résoudre sans que des têtes tombent ».
Les déclarations ambiguës du gouvernement pourraient être une deuxième manœuvre pour gagner du temps et épuiser le mouvement. En ce moment le recul total de Xi Jinping devant le projet de loi serait risqué car celui-ci enverrait un signe de faiblisse pouvant pousser plus loin le mouvement de contestation hong-kongais mais aussi encourager le combat la classe ouvrière chinoise. Cela serait dangereux pour Pékin notamment dans un contexte de guerre commerciale avec les Etats Unis où l’instabilité du hub financier qui est Hong-Kong – deux tiers des investissements directs étrangers transitent par l’île avant de rejoindre la Chine – pourrait affaiblir l’économie nationale et ouvrir une brèche dans laquelle ses adversaires pourraient s’immiscer.
Crédit photo : Dale De La Rey, AFP
Publié par REVOLUTION PERMANENTE