Après les manifestations de la fin de la semaine dernière qui ont paralysé le pays, la contestation est montée d’un cran en début de semaine avec l’entrée en mouvement des organisations indigènes. Ce 8 octobre, le parlement a été attaqué par les manifestants.
Jusqu’à présent, il y a eu plus de 450 arrestations, trois puits pétroliers sont occupés par les manifestants et le président Lenin Moreno a déplacé le gouvernement de Quito à Guayaquil.
Début octobre, Lenin Moreno a annoncé lors d’une allocution à la télévision diverses mesures économiques qui seront discutées et approuvées par l’Assemblée nationale en échange d’un prêt de quatre mille millions de dollars auprès du FMI. Les mesures sont de trois types : réduction du budget de l’État, une réforme du droit du travail et des mesures « compensatoires » afin d’éviter le mécontentement. La suppression de la subvention sur l’essence (dont le prix passe de 1 dollar à 2,30 dollars), mesure qui a suscité le plus de mécontentement, fait partie de la première série de mesures. Celle-ci a été mise en place il y a plus de quarante ans comme une forme de redistribution de la rente pétrolière.
Le premier secteur qui s’est mobilisé a été celui des organisations (patronales) du secteur des transports, qui ont bloqué le pays jeudi et vendredi. Cependant, les organisations du transport ont levé la grève vendredi après être arrivées à un accord avec le gouvernement autour de l’augmentation du prix du ticket de bus, entre autres. Le gouvernement a aussi décrété l’état d’urgence et fait appel à l’armée pour le maintien de l’ordre.
La situation est devenue plus conflictuelle ces derniers jours avec le soulèvement indigène qui se dirige vers la capital Quito. À la mobilisation appelée par la CONAIE, principale organisation indigène du pays, s’est joint le Front unitaire des travailleurs, principale confédération de travailleurs.
Devant les menaces d’un soulèvement dans la capitale, l’armée a délogé les journalistes du palais présidentiel et a déménagé le gouvernement de Quito à Guayaquil. Malgré les appels de Moreno au dialogue avec ses « frères indigènes », la répression a parfois été brutale dans certaines régions, où l’armée et la police ont ciblé des communautés indigènes. En réponse, une cinquantaine de militaires et de policiers ont été kidnappés par des communautés indigènes lors d’affrontements. Ceux-ci ont vite été libérés.
Plusieurs pillages ont eu lieu par les manifestants pendant leur remontée vers la capitale et aussi dans les grandes villes, dans un contexte de pénurie. Dans les marchés centraux, l’approvisionnement de biens est toujours irrégulier en raison du blocage des autoroutes. La province d’Azuay est entièrement coupée du pays, en raison des blocages. L’armée est en train d’approvisionner par avion Cuenca, la capitale régionale et une des principales villes du pays, en nourriture et en médicaments. La semaine dernière, les syndicats de travailleurs avaient aussi participé à des manifestations contre la réforme du code du travail.
Le gouvernement de Lenin Moreno s’est voulu être une « rupture dans la continuité » avec le gouvernement de Rafael Correa. Ce dernier était devenu trop impopulaire après dix ans au pouvoir pendant lesquels il s’est mis à dos le mouvement social. Pourtant, la situation économique de l’Équateur n’a pas cessé de se dégrader en raison de la dette. Ainsi, pour se laver les mains, lorsque Lenin Moreno s’est adressé au pays depuis Guyaquil lors d’une courte allocution de cinq minutes, il a accusé le gouvernement précédent d’être à l’origine de la situation économique catastrophique du pays et a accusé Correa et le président vénézuélien Nicolas Maduro d’être derrière les manifestations.
Lundi, le centre-ville de Quito était entièrement militarisé et la circulation contrôlée par l’armée. Le palais présidentiel, vide, était barricadé. Mardi, les écoles et lycées continuent d’être fermés administrativement. Les organisations indigènes, réunies au sein de la CONAIE et le FUT se sont distanciés tant de Lenin Moreno que de l’ancien président Rafael Correa - sans pour autant proposer un programme en positif. Ce 8 octobre, la situation est encore montée d’un cran, et le parlement a été attaqué par les manifestants. A ce titre, la journée de la grève et de la manifestation unitaire de mercredi sera décisive pour la suite des événements.
Publié par REVOLUTION PERMANENTE