A cette date, le gouvernement de Philippe Pétain collabore sans vergogne avec le Reich nazi depuis l'entrevue à Montoire avec Hitler, le 24 octobre 1940. C'est dire si l'économie française travaille pour l'économie de guerre allemande. De ce fait, dans le Nord et le Pas-de-Calais, les compagnies minières sont engagées dans cette politique collaborationniste et extraient chaque jour 93 000 tonnes de charbon pour l'Allemagne hitlérienne.
Mais fait unique unique, spectaculaire et massif, la grève des mineurs du Nord et du Pas-de-Calais fut la première grande manifestation de Résistance au sein du peuple de France.
Déjà, le 1er mai 1941, le PCF clandestin avait appelé les mineurs à une journée de luttes contre le "double joug de la domination capitaliste et étrangère." Des inscriptions avaient alors apparu sur les murs et des drapeaux rouges flotté au-dessus des corons. Le 15 mai 1941, ce même PCF interdit, depuis sa clandestinité, fondait dans notre pays, le Front national de lutte pour l'indépendance de la France "contre l'oppression nationale subie et contre les traîtres au service de l'envahisseur".
Lorsque les houillères de Dourges décide de réintroduire le paiement des ouvriers à l'abattage par équipes, la grève démarre et s'étend à tout le bassin minier du Nord-Pas-de-Calais, impulsée par le PCF et la CGT clandestine. Si la confédération CGT est interdite par Vichy, les unions locales et départementales demeurent autorisées. Elles sont aux mains de dirigeants réformistes ou carrément collaborationnistes, et René Belin, numéro 2 de la CGT avant-guerre, est ministre du Travail et de la Production industrielle de Pétain. Mais passant outre ces instances, 100 000 mineurs grévistes (Français et étrangers), soit plus de 80% de la corporation, se dressent contre Vichy et l'Allemagne nazie. Des cahiers revendicatifs sont déposés; des femmes défilent dans les corons pour appuyer cette grève.
Le 6 juin 1941, les Allemands déclarent l'état de siège et un climat de terreur s'installe dans les mines et les corons. L'administration française et ses forces de l'ordre collaborent avec les nazis.
Les femmes et mères de mineurs sont arrêtées en premier et emprisonnées à Lille ou Valenciennes comme otages. Quant au bilan des arrestations, il est impossible à préciser. La population cache les grévistes.
400 mineurs sont transférés à la forteresse d'Huy, dont 270 déportés immédiatement à Sachsenhausen au travail forcé, dont peu reviendront, à commencer par les 26 qui périssent pendant le transport. La répression se poursuit : les Allemands fusillent des dizaines de mineurs, traqués de la fin de la grève jusqu'en octobre 1941. Les femmes, filles, mères de mineurs s'entassent dans les prisons de toute la région.
Le travail reprend sous la surveillance des soldats allemands jusqu'à la fin de la guerre. Mais les compagnies minières ont accepté des augmentations salariales et un service d'approvisionnement des corons.
L'oubli de cet anniversaire se comprend mieux. il bat en brèche les théories des pseudo historiens sur l'entrée dans la Résistance du PCF le 21 juin 1941, date à laquelle le Reich nazi attaque l'URSS. Oublier cette collaboration, c'est aussi gommer la parfaite collusion du patronat français des houillères avec l'occupant. Enfin, c'est taire la plus importante mobilisation ouvrière en France occupée, contre le régime de Vichy et les Allemands. Car, du 27 mai au 10 juin 1941, cette grève des gueules noires du nord de la France revêt une indéniable dimension patriotique.
A l'heure, ou la peste brune menace la démocratie avec l'appui des médias aux ordres du capital, n'oublions pas cette révolte glorieuse de la classe ouvrière, quand l'horizon était borné de noir, de deuils, de souffrances et de sang.
Publié par Le Mantois et Partout ailleurs