Ce mercredi 15 novembre, plusieurs médecins généralistes ont été convoqués devant la CPAM de la Gironde à Bordeaux, au motif qu'ils prescrivent trop d'arrêts maladie.
Au mois de juin 2023, Sylvie Faret reçoit un courrier de la Sécurité sociale. C’est assez inhabituel pour le souligner, se dit-elle. Et là, stupeur. Cette médecin généraliste est convoquée très solennellement à la Caisse primaire d’assurance maladie de la Gironde (CPAM) début novembre 2023.
Le motif la sidère. Entre septembre 2022 et février 2023, la praticienne installée à Floirac, au nord de Bordeaux (Gironde), aurait prescrit des quantités anormales d’arrêts maladie. Huit autres généralistes sont convoqués avec elle.
« Ils ne prennent pas en compte ma patientèle »
« Dans une sorte de tribunal précaire, on m’explique que je prescris trop », souffle-t-elle, se souvenant de cette heure « horrible » de début novembre. En clair, la CPAM lui demande de baisser de 20% ses arrêts et souhaite la contrôler pendant quatre mois. « C’est absurde, ils ne prennent pas en compte ma patientèle qui est composée d’ouvriers, de précaires et de personnel de service. » Pour l’instant, elle attend la décision.
Touchée par le sort qui lui a été réservé, ce mercredi 15 novembre, Sylvie Faret est venue soutenir les six autres médecins dans le même cas qu’elle. Ils sont une poignée à répondre à l’appel. Le mouvement est national. En France, en 2023, environ 1 200 médecins auraient été convoqués par la CPAM, d’après le Comeli, le collectif pour une médecine libre et indépendante.
« La maltraitance institutionnelle »
« En fait, les gens souffrent de plus en plus et on nous reproche de les traiter, c’est du grand n’importe quoi », lâche un autre médecin, qui souhaite rester anonyme. Effet de la crise sanitaire, du télétravail ?
En 2022, 8,8 millions d’arrêts de travail ont été prescrits en France. Les dépenses d’indemnités quotidiennes ont atteint près de 15 milliards d’euros, soit une hausse moyenne annuelle de 3,8 % depuis 2010 et plus de 40 % en dix ans.
Devant les portes de la CPAM donc, les médecins défilent. « C’est de la maltraitance institutionnelle », lance un médecin, les mains dans les poches, le regard amer ; « on tape encore et encore sur nous », en confie un autre. « Je pense que l’on essaye de nous impressionner », termine Sylvie Faret.
Par Raphael Lardeur