Crédit photo : CGT ExxonMobil
ExxonMobil : les travailleurs en grève reconductible contre 700 suppressions d’emplois
ExxonMobil a annoncé la destruction de près de 700 emplois à la plateforme pétrochimique près du Havre. En réponse, les travailleurs ont débuté une grève reconductible vendredi dernier.
Le 11 avril, la direction de la multinationale américaine ExxonMobil a annoncé l’arrêt des activités de la production pétrochimique des usines de Port-Jérôme et de Lillebonne (Seine-Maritime) et la suppression de près de 700 emplois, et ce malgré des profits records pour l’entreprise. Dans le même temps, ExxonMobil annonçait la vente de la raffinerie à Fos-sur-Mer et les dépôts de carburant de Toulouse et Villette-de-Vienne (Isère).
Face au drame social annoncé, les travailleurs du secteur pétrochimique de l’usine de Port-Jérôme ont laissé exploser leur colère en entamant une grève reconductible ce vendredi 24 avril. Ce lundi, ils étaient plus de 400 réunis en assemblée générale et la reconduction de la grève a été voté jusqu’à jeudi prochain, journée lors de laquelle se tiendra une nouvelle réunion du CSE (comité social et économique).
Déjà la semaine dernière, le CSE s’était réuni pour la première fois depuis l’annonce des licenciements. À cette occasion, alors qu’était évoquée la quantité monstrueuse d’emplois détruits, le nouveau directeur de la plateforme, Edoardo Mirgone, a témoigné de tout son mépris pour les salariés en s’endormant, à la sidération des représentants syndicaux présents.
« On a un directeur de la plateforme qui est nul et qui s’en fout. Il est là pour casser de l’emploi, c’est tout. D’ailleurs son attitude le prouve bien en CSE : vendredi après-midi, alors qu’on commençait à discuter des emplois qui allaient être supprimées, monsieur s’est endormi en réunion ! Je vous promets, c’est pas une plaisanterie, il s’est endormi ! Ça montre bien son implication et la difficulté de l’avoir comme interlocuteur. » témoignait ainsi Germinal Lancelin, représentant CGT sur le piquet de grève ce lundi.
Mais ce qui a véritablement mis le feu au poudre vendredi dernier, c’est une tournée des membres de la direction dans les salles de contrôle afin de presser les travailleurs, menacés de licenciements, d’augmenter les cadences. Cela dans l’objectif de générer des stocks à revendre pendant plusieurs années aux clients, les entreprises pharmaceutiques. Le message de la direction aux travailleurs est donc très clair : épuisez-vous au travail avant qu’on vous mette à la porte.
« Le premier truc, c’est de sauver les emplois »
Pour légitimer son plan de licenciement et la délocalisation de la production pétrochimique de l’usine, la direction invoque des raisons écologiques, qui ne sont rien d’autre que du greenwashing. En réalité, ExxonMobil délocalise la production pétrochimique là où les normes environnementales sont plus faibles voire inexistantes, dans l’unique but d’accroître ses profits et en laissant des centaines de familles sur le carreau. Ce qu’elle assume elle-même dans son communiqué du mois d’avril, dans lequel elle explique notamment que : « La configuration du vapocraqueur, sa taille, comparée aux grandes unités nouvellement construites, les coûts opératoires et énergétiques plus élevés en Europe le rendent non compétitif ».
L’intersyndicale constituée de FO, CFDT, CGT et CFE-CGC a demandé à la direction, si le plan de suppressions d’emploi était amené à se maintenir, d’augmenter le nombre de départs en retraite anticipée et le montant des indemnités de licenciements. De son côté, la CGT continue de s’opposer à toute destruction d’emploi. Plusieurs travailleurs pointent d’ailleurs du doigt que la pétrochimie est un secteur bouché et que, au-delà du montant de l’indemnité de licenciement, les centaines d’employés concernés vont difficilement pouvoir retrouver un emploi, sans même parler des conditions de travail qu’ils devront accepter pour cela.
C’est ce qu’explique notamment Christophe, syndicaliste à la CGT, sur le piquet de grève : « On ne sait pas ce qui va se passer dehors, si malheureusement on est amené à être concerné par une procédure de licenciement, c’est quel emploi derrière ? Quel statut ? Quel job ? Comment ça va se passer ? Je crois que la meilleure solution pour avoir une pérennité de notre pouvoir d’achat, de notre vie actuelle, pour nos enfants, pour les salariés qui ont investi dans une maison avec un crédit, c’est de garder notre emploi ici ! ».
La CGT est en train de formuler un projet de viabilité pour le site, tout en sachant qu’il faudra se battre pour l’imposer à la direction. « C’est pas ExxonMobil qui va nous dire "ah oui c’est pas mal ce que vous nous proposez". Eux ils ont un projet et il est arrêté : ils veulent fermer. ». Plus largement, la fermeture des activités de chimie à l’usine est un enjeu régional, en tant qu’elle va avoir des répercussions indirectes sur des centaines d’autres emplois. « Il y a nos camarades d’Arlanxeo qui sont juste à côté, ils n’auront plus d’alimentation demain si la chimie doit s’arrêter. Qu’est ce qui va leur arriver ? Et bien la même chose que nous ils vont fermer, ils vont être licenciés, ils vont se retrouver au chômage sur le marché de l’emploi comme nous tous. » explique en ce sens Christophe.
Alors que des dizaines de milliers de travailleurs sont menacés de licenciements à travers le pays, les grévistes d’ExxonMobil montrent la seule voie à suivre : celle de la grève. Pour les milliers de familles qui vont être détruites, pour défendre également la planète face au greenwashing du patronat, il y a urgence à ce que les directions syndicales mettent leur force au service de la construction d’une réponse nationale aux licenciements massifs.
Publié par REVOLUTION PERMANENTE