Plusieurs principaux dirigeants du cimentier Lafarge sont mis en cause par la justice pour avoir indirectement financé des groupes armés en Syrie, dont l'organisation Daesh et une information judiciaire a été ouverte le 9 juin 2017 pour « financement du terrorisme » et « mise en danger d’autrui » après une plainte déposée par l’ONG Sherpa, élargie, le 23 juin, aux faits visés par le travail des douanes.
Mais au-delà de la mise en cause de ces dirigeants des questions se posent.
Dans un tel contexte une grande entreprise française implantée en Syrie depuis 2008 et qui est restée en Syrie avec l'aval politique du pouvoir et du Quai d'Orsay à la tête duquel se trouvait Laurent Fabius, ledit pouvoir pouvait-il ignorer les conditions concrètes de cette présence?
La question se pose d'autant plus que l'on connaît sans contestation possible le soutien de Fabius et du quai d'Orsay à l'époque de mouvements djihadistes comme Al Nostra par exemple.
Et l'on peut espérer que la fonction que Laurent Fabius occupe à la tête du Conseil constitutionnel ne constitue pas un obstacle à la mission de la justice!
En tout cas l'ONG "Sherpa" qui est à l'origine de la plainte contre Lafarge demande comme l'atteste l'article suivant du Point "l'audition par la justice de l'ex-ministre des Affaires étrangères".
L'opinion devra donc être attentive pour que la justice mène jusqu'au bout son enquête afin que ce ne soit pas seulement des "seconds couteaux" qui soient accusés, fussent-ils d'anciens dirigeants de l'entreprise!
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EXTRAITS de l'article du Monde du 20 septembre 2017
"A la fin de l’été 2012, la situation dégénère. « L’économie de racket a commencé en septembre ou octobre 2012 », se souvient M. Herrault. En septembre, deux responsables du groupe, Jean-Claude Veillard, le directeur de la sûreté, et Jacob Waerness, gestionnaire de risque sur le site de l’usine LCS, se rendent à Gaziantep, en Turquie, pour y rencontrer des milices de l’opposition syrienne.
« Il était très clair qu’elles étaient indépendantes et ne voulaient pas se coordonner. Et il était très clair qu’elles voulaient taxer ce qui passait par les routes, poursuit M. Herrault. C’était clairement du racket, même si c’était les “bons” qui rackettaient. Tous les six mois, on allait voir le Quai d’Orsay, qui nous poussait à rester."
SOURCE : Le Point du 13 octobre 2017
Laurent Fabius était-il au courant des agissements de Lafarge ? L'ONG Sherpa a demandé l'audition par la justice de l'ex-ministre des Affaires étrangères dans l'enquête sur le cimentier Lafarge, mis en cause pour avoir indirectement financé des groupes armés en Syrie, dont l'organisation État islamique (EI), a-t-on appris vendredi auprès d'un de ses responsables.
L'association anticorruption, qui avait déposé une plainte avec onze anciens employés syriens de la cimenterie, a demandé mercredi que l'actuel président du Conseil constitutionnel Laurent Fabius et deux anciens ambassadeurs de France en Syrie, Éric Chevallier et Franck Gellet, soient entendus par les juges d'instruction, a indiqué à l'AFP Marie-Laure Guislain, responsable du contentieux au sein de l'ONG, confirmant une information de Franceinfo. Lafarge, qui a fusionné avec le suisse Holcim en 2015, est au cœur d'une enquête sur les liens qu'il a pu entretenir, notamment avec l'EI, pour continuer à faire fonctionner sa cimenterie de Jalabiya (nord de la Syrie) en 2013 et en 2014, malgré le conflit. En septembre 2014, l'EI s'était finalement emparé du site.
Entendus par les enquêteurs des douanes judiciaires chargés de l'enquête, menée depuis juin par trois juges d'instruction, d'anciens responsables du cimentier ont affirmé que cette volonté de rester coûte que coûte dans le pays en guerre avait reçu l'aval des autorités françaises. « Le Quai d'Orsay nous dit qu'il faut tenir, que ça va se régler. (...) On allait voir, tous les six mois, l'ambassadeur de France pour la Syrie et personne ne nous a dit : Maintenant, il faut que vous partiez », a ainsi relaté Christian Herrault, ex-directeur général adjoint opérationnel, d'après une source proche du dossier. Pour Marie-Laure Guislain, « il est indispensable de rechercher toutes les responsabilités si l'État devait être impliqué dans cette affaire ».
Le rapport des douanes est accablant pour les anciens responsables du cimentier en France : les enquêteurs estiment qu'ils ont « validé » des remises de fonds à des organisations djihadistes « en produisant de fausses pièces comptables ». À ce jour, quatre anciens employés syriens ont été entendus par les magistrats instructeurs.
Jeudi, l'un d'entre eux a confirmé devant le juge « les pressions qu'il avait subies avec ses collègues pour les obliger à continuer à travailler », d'après la source proche du dossier. « Nous avons déposé une plainte avec onze salariés syriens. Mais il est pour l'instant difficile de faire venir les autres pour des questions financières et de visas », a déploré Marie-Laure Guislain.
PAR FSC