Budget 2026 : Bayrou déclare la guerre aux travailleurs, il faut préparer la riposte !
Dans un discours, le Premier ministre a présenté un plan austéritaire de 43,8 milliards, ainsi qu’une liste sans précédent d’attaques austéritaires et néolibérales contre les travailleurs et les classes populaires. Face à cette déclaration de guerre, le mouvement ouvrier doit préparer une riposte d’ampleur.
« Malédiction », « pronostic vital engagé », « menace », « moment critique » : dans son discours sur le « redressement des finances publiques », Bayrou a égrené les clichés classiques sur la dette publique pour mieux déclarer une guerre sociale totale aux travailleurs et aux classes populaires.
Le plan pluriannuel dépasse de très loin le budget à venir. Au motif que nous sommes « à la dernière station avant la falaise », Bayrou a défendu un projet austéritaire d’une violence inouïe, avec pour objectif de limiter le déficit à 4,6 % en 2026 puis à 4,1 % en 2027, pour atteindre 3,4 % en 2028 et 2,8 % en 2029. Pour 2026, l’offensive est plus massive que les 40 milliards prévus, avec un total de 43,8 milliards d’économies.
Un ouragan néolibéral, austéritaire et anti-ouvrier
Pour atteindre cet objectif, Bayrou a présenté un double plan : le premier, « Stop à la dette », saignera à blanc les dépenses publiques, tandis que le second, « En avant la production », promet de nouvelles contre-réformes d’inspiration néolibérale. Première manœuvre de la guerre sociale : le budget 2026 comptera 28 milliards d’économies dans le budget de l’État, une partie des 43,8 milliards que le gouvernement souhaite trouver.
D’une part, une « année blanche » est déclarée, à l’exception du budget de la Défense et de la charge de la dette, pour réaliser 7 milliards d’économies, grâce à la désindexation sur l’inflation des retraites, des allocations et du barème de l’impôt sur le revenu. Au gel s’ajoutent des mesures austéritaires : 3 000 postes seront supprimés dans la fonction publique, 1 000 à 1 500 dans les agences de l’État, en plus du non-remplacement d’un fonctionnaire sur trois partant à la retraite, de la non-revalorisation des salaires, de la diminution des participations de l’État et du « lissage conjoncturel » du budget des collectivités territoriales pour 5,3 milliards d’euros.
D’autre part, le budget fera de la santé sa cible privilégiée pour réaliser 5 milliards d’économies supplémentaires : des attaques contre les personnes touchées par des affections de longue durée, à la mutualisation des achats des services hospitaliers, en passant par l’extension de l’ambulatoire. Bayrou va même jusqu’à proposer de récupérer les équipements des malades décédés pour limiter les coûts.
Pour trouver les milliards restants, le gouvernement compte sur la lutte contre la fraude qui vise principalement les plus précaires, la suppression de l’abattement de 10 % pour les retraités (partiellement compensée par un forfait annuel). Enfin, une « contribution de solidarité » pour « les plus fortunés » dont on ne connaît pas le montant, mais qui sert à donner l’illusion que tous prendront part à « l’effort national ». Au total, 43,8 milliards d’euros, dont l’écrasante majorité sera supportée par les travailleurs, les classes populaires et les plus précaires.
« Le désenchantement face au travail est un ennemi public » : c’est ainsi que Bayrou a introduit une seconde offensive massive. Au programme : la suppression de deux jours fériés (le lundi de Pâques et le 8 mai) pour « remettre le pays au travail », une nouvelle réforme de l’assurance chômage, une loi travail à venir et, surtout, la mise en place d’une « allocation sociale unifiée » dont les contours sont flous mais présagent de prochaines attaques contre les minimas sociaux. Une offensive anti-ouvrière majeure pour faire payer aux travailleurs et aux classes populaires la crise du capitalisme français, qui n’est qu’un « préambule » en vue des « réformes de fond dont notre pays a besoin », comme le concluait Bayrou.
Ce n’est pas aux travailleurs de payer la crise
Au moment du budget Barnier, le gouvernement cherchait à mettre sur le dos des travailleurs la facture exorbitante que des décennies de cadeaux fiscaux aux patronats ont fait exploser. Alors que les patrons français ont reçu 221 milliards d’aides pour la seule année 2023, la politique de l’offre menée depuis des décennies a creusé la dette – plus de 1 000 milliards depuis l’arrivée de Macron au pouvoir.
Après les 32 milliards de coupes budgétaires et 20 milliards de hausse d’impôts du budget 2025 n’ont vraisemblablement constitué qu’un avant-goût, un budget d’urgence face à la crise politique. En 2026, Bayrou relance ainsi une attaque austéritaire et néo-libérale d’ampleur, pour répondre à l’inquiétude des classes dominantes et d’un patronat radicalisé, dont le déclin pourrait s’accélérer face à une situation économique inquiétante, sur fond de guerre commerciale.
Enfin, face « à la dégradation accélérée de l’environnement sécuritaire mondial », comme l’explique la Revue nationale stratégique publiée hier, les classes dominantes souhaitent se réarmer pour protéger leurs intérêts menacés par le déclin de l’impérialisme français, notamment en Afrique, et pour tenir fermement leurs colonies. Macron a annoncé que l’objectif des 67,4 milliards d’euros devrait être atteint dès 2027, plutôt qu’en 2030. Aux 3 milliards d’augmentation déjà prévus, Macron entend ajouter 3,5 milliards supplémentaires au budget des armées. La guerre ne connaît pas l’austérité : le budget 2026 consacrera la somme exorbitante de 57 milliards d’euros à la Défense.
En plus de ces trois aspects de crise, les annonces de Bayrou menacent surtout de rouvrir la crise politique. Comme il l’a lui-même noté à la fin de son discours, « il n’y a que des risques : le gouvernement n’a pas de majorité, il arrive même que ses soutiens ne soient pas totalement convaincus, tout concourt au fatalisme ».
Face à la guerre sociale, il faut construire une riposte ouvrière et populaire !
Si Bayrou a fait le choix d’ouvrir la séquence budgétaire bien en amont, en dramatisant à l’extrême la situation pour faire pression sur l’Assemblée, il y a peu de chances pour que cette rhétorique d’urgence désamorce les oppositions. S’il a indiqué son intention de discuter avec tous les partenaires sociaux et les partis politiques, dans une tentative de répéter sa « nouvelle méthode », déjà testée lors du conclave sur les retraites, rien ne dit que la supercherie marchera plus d’une fois.
Alors que le spectre de la censure est revenu sur le devant de la scène ces dernières semaines, les annonces de Bayrou ont suscité de vives réactions. Jordan Bardella dénonce déjà la « suppression des jours fériés » comme une « provocation ». Quant à Marine Le Pen, elle appelle Bayrou à « revoir sa copie » sous peine de censure. Une série de déclarations qui visent à repositionner le RN dans une logique d’opposition à Bayrou après lui avoir sauvé la peau avant l’été sur les retraites et une séquence de « normalisation » et de séduction patronale. Pour autant, rien ne dit que le RN ne finira pas par laisser Bayrou faire le sale boulot austéritaire.
Du côté de LFI, Éric Coquerel juge que Bayrou a « déclaré la guerre au monde du travail » tandis qu’au PS, Olivier Faure dénonce une « année noire » à venir et « un plan de démolition de notre modèle français » sans agiter le spectre de la censure, ouvrant la voie à l’orientation préconisée par Philippe Brun récemment : « Il faudra négocier ».
Contre ce budget austéritaire et les contre-réformes néolibérales à venir, il est urgent que le mouvement ouvrier oppose un plan de bataille et profite de la fragilité du gouvernement. Cela impose de rompre avec le dialogue social qui nous conduit droit dans le mur. Il faut tirer la leçon de la fin du conclave sur les retraites et refuser de poursuivre le dialogue social dans d’autres cadres, comme la pseudo « cellule de crise » défendue par la CGT pour répondre à la guerre commerciale main dans la main avec le patronat, qui veut faire payer la crise aux travailleurs.
Face à cette offensive tous azimuts, cette stratégie est une impasse. À l’instar de SUD Rail, qui appelle « à construire dès à présent les mobilisations » pour porter « l’exigence d’un autre budget », le mouvement ouvrier et ses organisations doivent intervenir dans la crise et profiter de la fragilité du régime pour porter, par les méthodes de la lutte des classes, un programme qui articule les revendications économiques et démocratiques et cherche à construire un grand mouvement d’opposition à la militarisation, à l’austérité et aux contre-réformes néolibérales de Bayrou et son monde. C’est par les méthodes du mouvement ouvrier, par la rue et la grève, que notre camp social pourra mettre un frein à la course au réarmement qui nous mène à l’abîme et à la guerre sociale que le gouvernement veut mener contre les travailleurs.
Publié par REVOLUTION PERMANENTE