Unilever a justifié, fin mars, la fermeture du site Knorr dans le Bas-Rhin par une baisse des ventes et un regain d'intérêt des Français pour le fait maison. Les organisations syndicales, qui viennent d'entrer dans les négociations du plan de sauvegarde de l'emploi, y voient une volonté de délocaliser l'activité.
Le 8 avril, après une réunion de plus de dix heures avec la direction du site Knorr de Duppigheim (Bas-Rhin), les organisations syndicales n'étaient pas plus convaincues qu'au petit matin des arguments déployés par le groupe Unilever (1,4 milliard d'euros de chiffre d'affaires en 2020) pour fermer l'usine de production de soupes, de sauces déshydratées et de Maïzena.
Le 25 mars, la fin de son activité a été annoncée pour le dernier trimestre 2021.261 salariés seront touchés, plus les sociétés extérieures et les intérimaires. Raison invoquée par le groupe dans un communiqué : une « baisse structurelle des ventes depuis dix ans et qui s'accélère depuis cinq ans, les consommateurs privilégiant de plus en plus le fait maison». Suit une liste d'arguments chiffrés, dontune baisse de 26 % du marché français des soupes entre 2012 et 2019, et de 23 % en volume des ventes de soupes du groupe entre 2016 et 2020.
En dépit d'investissements à hauteur de 21,4 millions d'euros sur le site de Duppigheim, celui-ci n'est utilisé aujourd'hui qu'à 40 % de ses capacités. Une porte-parole du groupe rapproche cette situation de l'essor des robots de cuisine et d'une baisse de consommation des entrées dans les foyers français.
Le site produit à 47 % pour les marchés européens et à 53 % pour la France. Unilever envisage de conserver cette part de la production dans l'Hexagone, via un sous-traitant, tandis que d'autres sites en Europe de l'Ouest devront être « consolidés » après la fermeture.
Les organisations syndicales voient plutôt des velléités de délocalisation dans cette annonce, alors qu'en 2007 le service recherche et développement avait déjà quitté Duppigheim pour la Pologne. Martial Schwartz, délégué syndical FO, estime qu'il n'y a depuis « plus eu de réelle innovation sur le site. Les collègues polonais de la recherche et développement nous ont visités un temps puis ont arrêté. Nous ne fabriquions plus que des standards, par exemple les soupes douceur de légumes ou velouté de potiron, et les seules innovations consistaient à enlever du sel, de la crème, du beurre… De quoi réduire les coûts ».
En 2014, un plan de sauvegarde de l'emploi (PSE) avait touché 41 personnes, lors du départ de productions déshydratées vers l'Allemagne. Le rapatriement de la production de Maïzena cette même année 2014, soit un volume de 14.000 tonnes par an « avec un investissement de 3 millions d'euros sur la ligne concernée », selon la porte-parole, ne change pas la donne pour les syndicats.
La prochaine réunion de négociations sur le PSE est prévue pour le 26 avril. 70 postes ont été identifiés, selon la direction, pour permettre des reclassements sur d'autres sites d'Unilever en France. Aucun repreneur n'a été trouvé.
Bénédicte Weiss (Correspondante à Strasbourg)