La grève des contrôleurs qui perturbé considérablement le trafic voyageurs durant le week-end de Noël, met à jour, d'une part, la crise profonde d'un service public essentiel et, d'autre part, la stratégie des luttes sociales en France.
Comment agir d'une manière efficace pour ses conditions de vie et de travail, en cette fin d'année 2022, dans une profession, qui relève du service public ?
Ce dernier conflit social portait sur les revendications des contrôleurs, les seuls salariés présents dans les trains en contact avec les voyageurs, eux-mêmes mécontents des services SNCF.
Déjà, en 2005, à la suite du viol d'une contrôleuse, ses collègues avaient débrayé avant de lancer une pétition hors syndicats, pour l'amélioration de leur statut.
S'ajoute à cette situation, la question des rémunérations en perpétuelle dégradation. Et une longue négociation sans issue convenable pour les contrôleurs.
D'où le conflit actuel et la grève massive du week-end de Noël.
Ce qui a déterminé la Direction de la SNCF à proposer des avancées nouvelles, et, de ce fait, l’annulation du mouvement prévu pour le Nouvel An.
Ce conflit social à mis à jour les difficultés du mouvement syndical à mobiliser une profession sur des objectifs communs ou catégoriel.
Disons que les réformes successives de la SNCF, depuis plus de quarante ans, en vue d'offrir ce service public au privé ont modifié considérablement la profession. D'abord en nombre : les cheminots dépassaient 254.400 au début des années 80, alors qu'ils ne sont plus aujourd'hui que 136.388...
Ensuite le changement de statut des personnels, l'éclatement de l'entreprise en plusieurs filiales, l'embauche des nouveaux salariés, qui ne sont plus les héritiers des combats historiques des cheminots et qui ne bénéficient plus de leur statut.
Toutes ces "réformes" réalisées en vue de la privatisation du service public du rail jouent sur la combativité des cheminots.
Sans oublier, le massacre du Code du Travail, opéré par Macron dès les premiers jours de son entrée à l'Elysée, en 2017, privant ainsi les salariés des armes légales que la lutte et la loi leur avaient données.
Ainsi, "Le Monde", sur une page (daté du 24 décembre), note sous le titre "SNCF : un mouvement venu du terrain"
"Alors qu'Emmanuel Macron menace de revoir les règles de préavis de grève, Sud Rail estime qu'il ne faut pas s'étonner de l'apparition de 'collectifs' comme celui constitué par les contrôleurs à l'initiative de ce mouvement de grève, lorsqu'on a supprimé 70% des effectifs syndicaux en fusionnant les anciens comités d'entreprise et comités d'hygiène et sécurité et des conditions de travail (CHSCT).
Ajoutons la fermeture des guichets et des gares - et la suppression du personnel affecté - privent la population de nombreuses cités de l'emploi du réseau ferré avec la tentative de lui substituer un réseau de bus privés, a détruit un service public, connu et envié à l'étranger, par son maillage fin du territoire, ses records de ponctualité, ses trains de prestige, tel "le Mistral" ou "le Capitole". Et dès les années 80, les premiers TGV.
Cette volonté du pouvoir financier de s'accaparer pour les privatiser, les joyaux des infrastructures nationales que la France s'était données, sont la cause essentielle de son mal-être et des fractures de la société.
JEAN LÉVY
Publié par EL DIABLO