SYNDICAT CGT UNILEVER FRANCE HPCI

SYNDICAT CGT UNILEVER FRANCE HPCI

Syndicat CGT Unilever HPCI France

Publié le par Syndicat CGT Le Meux
Publié dans : #Notes d'information Cgt Unilever

 

Le président de BlackRock France, Jean-François Cirelli, a été élevé au rang d’officier de la Légion d’honneur. 

Pour la sociologue Monique Pinçon-Charlot, spécialiste de la grande bourgeoisie et auteure avec Michel Pinçon du livre Le Président des ultra-riches (éd. La Découverte), c’est le symbole d’une “camaraderie de classe et de l’entre-soi oligarchique”.

Alors que BlackRock est accusé de faire du lobbying pour que la France passe au système de retraite par capitalisation, que vous inspire cette décision ?

Monique Pinçon-Charlot

Cette promotion au rang d’officier de la Légion d’honneur de Jean-François Cirelli confirme la camaraderie de classe et l’entre-soi oligarchique qui existe de fait. Alors que nous sommes dans une phase particulièrement difficile du point de vue des rapports de classe, cette reconnaissance symbolique à travers la Légion d’honneur – qui n’a pas d’autre valeur que symbolique – est une façon sidérante, cynique et insupportable, d’ajouter de la violence à la violence.

 

Matignon estime que “ce qui prévaut, c’est le parcours de M. Cirelli au service de l’Etat depuis 35 ans”…

Monique Pinçon-Charlot

Ce personnage est pourtant emblématique des oligarques prédateurs, c’est-à-dire qui pillent l’Etat par tous les bouts, en étant au cœur de celui-ci. Jean-François Cirelli a commencé sa carrière à la direction du Trésor, au ministère de l’Economie et des Finances. Puis il est passé au cœur de la finance en devenant administrateur suppléant pour la France au Fonds Monétaire International (FMI) pendant deux ans.

Ensuite, il est devenu secrétaire général du Club de Paris pendant trois ans, à Bercy. Le Club de Paris est un groupe informel de créanciers publics et privés, qui se retrouvent à Bercy, afin de négocier les restructurations des dettes des pays les plus pauvres. A chaque fois, pour avoir des nouveaux prêts, ils conviennent de politiques d’ajustements structurels. Enfin, en tant que délégué général de GDF Suez, il a mené à bien sa privatisation. C’est caractéristique de ce que Laurent Mauduit décrit dans son livre, La Caste. Qu’il ait obtenu cette promotion est donc parfaitement logique : c’est le coup symbolique qu’il faut asséner aux grévistes, à ceux qui tentent de lutter, de faire valoir leur droit à cette retraite basée sur la solidarité et la répartition.

 

La secrétaire d’Etat Agnès Pannier-Runacher a défendu que BlackRock ne faisait pas de lobbying car “il n’a pas grand-chose à gagner” dans la réforme des retraites. Le gouvernement accuse pour sa part ceux qui défendent cette thèse de “complotisme”. Qu’en pensez-vous ?

Monique Pinçon-Charlot

Rien ne m’étonne. A bout d’arguments, les deux mots mobilisés contre nous sont systématiquement “complotisme” et “populisme”. Ce qui est extraordinaire, c’est qu’en effet, notre travail d’ethnologues et d’entrisme pendant plus de trente-cinq ans dans la haute bourgeoisie nous rend légitimes pour affirmer que cette classe sociale est en permanence dans un entre-soi, qui se décline sous toutes les formes possibles et imaginables.

Le lobbying en est une, les conseils d’administration, les beaux quartiers, les cercles, les rallies pour jeunes, etc., en sont d’autres. La nébuleuse institutionnelle de mobilisation de cette classe à l’échelle mondiale est absolument sidérante. Si ça, ce n’est pas un complot, qu’est-ce que c’est ? Ils retournent ce terme en nous accusant de complotisme, c’est le propre de la manipulation. Le second mot qu’ils utilisent pour nous stigmatiser, c’est populisme. Ce faisant, ils stigmatisent en fait la colère des grévistes et des salariés, qui est immense dans le pays.

Par ailleurs, dans la liste des décorés du 1er janvier, Jean-François Cirelli n’est pas le seul représentant de la finance…

 

Monique Pinçon-Charlot

En effet. La stratégie de cette classe a toujours été de masquer la forêt, pour qu’on ne voie que des arbres. En l’occurrence, on nous donne en pâture Jean-François Cirelli, mais dans la même promotion, il y a plusieurs représentants de la finance et du monde de l’assurance. Antoine Flamarion, cofondateur de Tikehau Capital, a été fait Chevalier de la Légion d’honneur, de même que Jean-David Chamboredon qui est patron du fonds d’investissement ISAI, fondé en 2008 par Geoffroy Roux de Bézieux (le président du MEDEF depuis 2018, ndlr), ou encore Karima Silvent, DRH du groupe d’assurance Axa.

Le patron d’Axa, Thomas Buberl, a pour sa part été promu à la dernière promotion du 14 juillet… Les réseaux sociaux se braquent sur Cirelli à juste titre car il est exemplaire : il est responsable de BlackRock pour la France, la Belgique et le Luxembourg, qui est le plus grand paradis fiscal. C’est le symbole d’une oligarchie mobilisée pour le dépeçage systématique de l’Etat. Il n’y a plus de conflits d’intérêts. Ils sont dans la synthèse permanente des intérêts de l’oligarchie.

Qu’est-ce que cela changerait, si les fonds de pension tels que BlackRock faisaient main basse sur les retraites des Français ?

 

Monique Pinçon-Charlot

C’est un problème de solidarité, et de rapport à l’humain. Ce qu’on nous propose est une retraite par point, c’est-à-dire le chacun pour soi. Les femmes seraient massivement pénalisées dans ce système. Dans le système actuel en revanche, les jeunes payent pour les vieux, et ils seront payés ainsi à leur tour lorsqu’ils prendront leur retraite. Nous avons un minimum garanti pour tous, un système d’évaluation des retraites assez juste, et on est le pays où les retraités sont les moins pauvres et les moins malades d’Europe. Avec le système de retraite par point individuel, géré par des fonds de pension, ce qui est en route, c’est un processus de déshumanisation.

 

Propos recueillis par Mathieu Dejean

Publié par FSC

Visiteurs

520655

 

Se syndiquer CGT ?

Certains diront « à être défendu », d’autres « à lutter tous ensemble ». En fait, les deux idées sont inséparables. Le syndicat sert à s’unir, à s’organiser et à agir collectivement pour se défendre dans la lutte des classes et conquérir de nouveaux droits.
Le syndicat d’entreprise est la base du syndicalisme, car situé au plus près du salarié. Il fonctionne avec les syndiqués qui proposent, orientent et décident de l’activité.

Archives

Articles récents

Hébergé par Overblog